Une transposition théâtrale d’un roman dense
La pluie empêche le panneau du village et Agathe revient dans le pays. Après des années à New York où elle tente de percer comme scénariste de séries, elle se retrouve en Dordogne, près de la maison familiale nichée dans un bois détrempé. Leur père, désormais décédé, était guide des grottes préhistoriques et était divorcé de leur mère. Agathe retrouve sa sœur cadette, Véra, muette depuis l’enfance à la suite d’une crise d’aphasie et restée dans le pays du père.
Dans les jours qui suivent, il s’agit de vider la maison d’enfance, de trier, jeter et peut-être renouer des liens devenus distants.
Le roman « Le vieil incendie » porté sur scène
Le récit, bref et dense malgré ses environ 140 pages, a été signé Elisa Shua Dusapin et publié il y a deux ans chez Zoé. Il ne s’éteint pas avec sa forme romanesque et s’adapte aujourd’hui à la scène sous forme de pièce théâtrale.
Dispositif scénique et parole muette
La question centrale — rendre audible la voix d’une sœur muette — est résolue par le dispositif: les textos écrits par Véra apparaissent sur un panneau amovible; deux autres panneaux minimalistes évoquent les murs ou la forêt; et la voix intérieure de la sœur devenue adulte s’impose sur le plateau, portée par Eve Aouizerate dans le rôle de la narratrice.
Sur scène, Eve Aouizerate assure la narration, tandis que Coline Bardin interprète Agathe et Baptiste Morisod incarne Octave. Véra est suggérée par les textes projetés et le décor se module entre murs et forêt.
Une distribution et une écriture au service du sujet
Le trio d’interprètes est à fleur de mots et de regards, donnant vie et corps à ce Vieil incendie au rythme d’une écriture pudique et retenue qui explore les liens entre sœurs lorsqu’une promesse n’a pas été tenue.
Direction artistique et calendrier
Mis en scène par Ludovic Chazaud à la demande de la nouvelle directrice du Poche, Martine Corbat, « Le vieil incendie » constitue la troisième transposition théâtrale de l’œuvre de l’auteure jurassienne Elisa Shua Dusapin, après Hiver à Sokcho et Le colibri. L’ensemble laisse des espaces à l’imaginaire et au regard.
Note: 4/5
Dates et lieux : Le vieil incendie est joué au Poche, Genève, jusqu’au 12 octobre 2025, puis au Théâtre du Jura, Delémont, les 18 et 19 novembre 2025, et au Casino-Théâtre, Rolle, du 3 au 5 décembre 2025.
Crédit photo : Thierry Sartoretti/mh